Suis-je la seule à ne pas vouer un culte au « vrai ami » ? à « l’ami parfait » ?
Ce prétendu ami qui sera toujours là, prêt à aider si on l’appelle à 4h du mat en cas de pépin, présent pour un déménagement à la dernière minute ?
Est-ce que vous jugez toutes vos relations selon ces critères ? Les personnes les plus précieuses dans votre entourage sont-elles les plus disponibles ? Celles qui répondront forcément au téléphone quelle que soit l’heure ? Celles qui donnent toujours des nouvelles ?
Personnellement j’ai vraiment du mal avec ces définitions prédéfinies du « vrai ami ».
Pour moi, chaque relation a de la valeur, et juger de l’importance d’une personne selon des critères figés, comme si on distribuait des étoiles dans un guide Michelin, ça m’angoisse terriblement.
J’entretiens des tas de relations très particulières et différentes, et à mes yeux toutes aussi précieuses les unes que les autres, avec des tas de personnes qui ont chacune leur importance dans ma vie. Ces relations sont fluctuantes. Certaines personnes ont été importantes à une période et moins plus tard, et vice-versa.
Y a ces personnes que je vois très souvent, parce qu’on a chacun cette disponibilité, là en ce moment. Et ça ne sera peut-être plus le cas un jour. On part fréquemment en voyage ensemble, on se rejoint les week-ends, on s’invite les uns chez les autres. Et ça me satisfait déjà amplement.
Y a ces personnes que j’ai rencontrées à une époque, que j’ai adorées, mais qui vivent désormais loin, et avec qui je n’ai plus de contact, mais auxquelles je pense parfois. Et avec lesquelles il est arrivé de se retrouver plus tard de manière presque inattendue et super agréable.
D’autres qui ont paru super importantes à une période mais que j’ai quasiment oubliées.
Y a ces personnes avec qui j’ai passé beaucoup de temps et avec qui je suis super proche, intime, mais qui par exemple sont jeunes mamans, là en ce moment. Et non, même si on s’adore, ça ne me viendrait pas à l’esprit de les appeler en pleine nuit en cas de pépin ou pour un déménagement.
Y a ces personnes que je connais depuis longtemps, dont j’apprécie la compagnie, que c’est un plaisir de rencontrer, avec qui les discussions sont toujours intéressantes, mais avec qui je n’ai jamais passé de moment en privé, et dont je n’ai peut-être même pas le numéro de téléphone.
Y a ces personnes qu’on ne voit seulement une de fois de temps en temps et pour lesquelles on a pourtant beaucoup de respect, qu’on apprécie tout particulièrement.
Y a ces personnes aussi qui semblent répondre à tous les critères presque unanimement considérés comme ceux définissant le « véritable ami ».
Y a ces personnes rencontrées très brièvement, mais avec qui y a eu un « truc », avec qui ça a été très court, mais pourtant très fort.
Y a ces gens en qui j’ai cru pendant longtemps mais qui m’ont finalement déçue, et d’autres rencontrés plus récemment, avec lesquels je ne pensais pas accrocher et avec qui maintenant quelque chose de fort se crée.
Y a ces petits amis ou petites amies du passé, qui étaient toute notre vie à ce moment-là. On en fait quoi ? C’était pas sincère à l’époque ? Et c’est pas pareil avec les « amis » ?
Je pourrais encore en énumérer des tonnes, mais pour moi, toutes ces personnes ont de la valeur, toutes ces personnes ont compté à un moment dans ma vie, ont participé à la construction de la personne que je suis maintenant.
Classer les gens en distinguant les vrais amis de ceux qui ne le sont pas, comme si c’était définitif, comme si c’était tout ce qui comptait, je trouve ça insultant. Je me demande si on ne rate pas des choses quand on croit qu’il faut à tout prix choisir qui sont nos vrais amis et ceux qui ne le sont pas. Des projets incroyables naissent parfois de relations à la base superficielles.
Tolérance, acceptation
Y a des gens qui ne sont pas doués pour entretenir correctement des relations amicales selon les conventions, des personnes qui ne répondent pas au téléphones parce qu’elles sont introverties.
Y a des personnes qui aiment les gens mais détestent se retrouver en groupe et n’osent pas le dire, ou qui n’aiment pas faire la bise, faire des hugs, avoir des contacts physiques. Ça ne signifie pas qu’elles sont moins amicales, moins ouvertes ou moins dignes d’intérêt.
Les gens que je côtoie ont tous des rôles différents dans ma vie. Si on décide de passer du temps ensemble, qu’ils soient des vrais amis ou non, je m’en fous pas mal.
Voici des portraits de certaines de ces personnes.
Vous aurez certainement compris le sujet était plus ou moins une excuse pour publier mes portraits. Ceci dit si l’amitié au Japon vous intéresse, vous pouvez toujours relire ce vieil article qui s’y consacre : Se faire des amis au Japon.
Vous pouvez aussi :
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Merci de partager !
David
février 16, 2020
Chouette série de portraits indeed (j’ai même reconnu quelques visages de l’époque de ton premier blog, et de la fois où on s’était croisés).
Quant au mythe du « vrai ami » c’est pas plus une question de maturité ? Quand on est jeune, on cherche le vrai ami comme on cherche l’âme sœur. En gagnant un peu d’expérience de la vie, on comprend que ça marche pas toujours exactement comme ça ? Je sais pas.
Mais chouettes portraits. 🙂
Judith Cotelle
février 16, 2020
Merci !
Mais zut par contre, ne l’ayant encore partagé nulle part, je comptais ré-éditer un peu cet article écrit vite fait pour reformuler certains passages maladroits et ajouter une ou deux remarques dont celle-ci. Donc oui en effet, c’est ce que je pense aussi.
chris
février 18, 2020
De très beaux portraits, et un sacré sujet.
Je crois aussi à un problème de maturité pour la notion de « vrai » (notion trop absolue pour moi). Et aussi à une idée de notion très intime et personnelle de l’amitié : chacun se fera la sienne avec le temps et l’âge.
Il y a aussi la possibilité de « ranger dans sa tête » les gens : les « potes », « camarades » d’un côté et les quelques amis de l’autre ou les « autrefois nous fûmes amis » etc…
Judith Cotelle
février 18, 2020
Merci !
Oui c’est ça ! « notion trop absolue » ← c’est bien formulé !
J’avoue que dans ma tête je fais un peu inconsciemment ces petits classements tout de même par moment : « ami de la mort / super pote / bon pote / etc », et ce n’est ni définitif, ni en contradiction avec ce que je dis dans l’article je pense.
Y a des personnes que j’adore vraiment, pour qui j’ai de l’admiration, du respect, et qui semblent éprouver des choses identiques à mon égard, et pourtant on n’a jamais atteint ensemble le stade d’amis super proches qui se font systématiquement des confidences profondes, pour des tas de raisons, parce que’on ne peut pas se voir aussi souvent qu’on le souhaiterait, etc, et que c’est déjà cool comme ça.
Je pense aussi à autre chose là. Je ne sais pas si c’est pareil entre garçons, mais entre filles pendant l’enfance et à l’adolescence, et parfois même plus tard, on a tendance à avoir des relations qui s’apparentent à celle d’un couple, un peu trop passionnelles, avec de la jalousie, et même une rupture un jour. Du coup ce n’est peut-être pas plus mal d’éviter d’attribuer le rôle de « meilleur ami » aux autres avec toutes les attentes que cela implique, une fois qu’on est adulte et un peu plus stable émotionnellement et dans sa vision des relations humaines.
J’avais souvent réfléchi à tout ça, mais comme je vois regulièrement passer des discussions / débats sur Twitter à propos de la possibilité ou non de se faire des « vrais amis / close friends » au Japon, j’ai eu finalement envie de poser ça par écrit sur ce blog.
Alex
février 19, 2020
Dans beaucoup de cas, tu as des personnes qui vont évaluer une relation pour ce qu’elle leur apporte (dans tous les domaines). Je pense que le problème vient déjà du fait d’évaluer un sentiment humain.
Tu as -a mon sens- une approche plus ouverte à l’amitié, qui ne se définit pas par des critères préétablis. En fait, c’est plutôt assez simple quand on arrête de catégoriser les personnes et qu’on passe outre les défauts qu’on perçoit.
J’ai toujours eu beaucoup de mal à garder contact avec des amis d’enfance. J’ai longtemps admiré les gens qui y parviennent, qui conservent ce lien par des biais divers (téléphone, réseaux sociaux, mails…).
Je ne sais pas pour toi, mais je fonctionne à l’inverse. Je n’éprouve pas le « besoin » de garder ça intact, mais je prendrais autant de plaisir à revoir la personne si ça devait se faire. Quand bien même des années se seraient écoulées.
Bref, c’est un vaste sujet qui est passionnant! Et tes portraits font ressortir beaucoup des personnes que tu photographies, ils sont magnifiques (les sujets et les portraits!).
Judith Cotelle
février 19, 2020
Merci pour ton commentaire !
Oui, pareil, je n’ai jamais été douée pour garder les contacts. Je déteste le téléphone, et j’ai du mal avec les monologues par e-mail. Malgré tout j’ai pu revoir quelques amis pré-internet / pré-réseaux sociaux lorsqu’ils étaient de passage au Japon. Une copine d’y a 20 ans, recroisée une seule fois y a 10 ans, et un ex-petit ami pas vu depuis 22 ans, et en fait, c’était complètement naturel, cool, agréable. Aucune gêne.
Je dis ça, mais même avec des amis / potes plus récents et moins éloignés, je me reproche sans cesse de ne pas faire suffisamment d’efforts pour maintenir le contact si pour des raisons on ne peut plus se voir aussi souvent que dans le passé.
Je fonctionne plus sur le moment, et espère que ce n’est pas un signe de superficialité :/
ALEX
février 21, 2020
Si la superficialité se résumait à vivre l’instant, je veux bien en être! ; )
Je ne crois pas qu’on doive se sentir coupable de décevoir par notre manière d’être. Si elle occasionne une gêne, ou un malaise, il va d’abord naitre chez l’autre, qui n’accepte pas. L’ami coupera de lui-même les ponts. Bon après ça n »exclue pas de se remettre en question, mais on se flagelle déjà assez régulièrement quand on est emprunt de sensibilité.
alex
février 21, 2020
Empreint* (désolé)