Vous vous en souvenez peut-être ? Il y a 1 an et demi, j’écrivais cet article « La fin d’une aventure & devenir graphiste freelance au japon », qui sentait l’angoisse et la panique.
En effet, alors que j’occupais un poste bien confortable depuis 5 ans dans une agence de graphisme à Hiroshima, j’apprenais que j’allais soudainement perdre mon emploi.
Et bien aujourd’hui, j’ai décidé de vous raconter ce qui s’est passé depuis, d’autant plus qu’on me pose souvent des questions à ce sujet. Je passerai donc en revue les différentes étapes et ferai un petit point sur ma situation actuelle.
Mais avant cela, je vous conseille de lire (ou relire) l’article en question.
Le problème de visa
Je finissais cet article en expliquant que ma demande de visa permanent (qui devait me permettre de travailler en freelance) avait été refusée (relire les détails sur ma page Facebook). Nous étions alors le 2 février 2018, et ma boîte était censée fermer fin mars suivant.
Sachant que mon patron souhaitait continuer en « freelance » sans vraiment fermer l’entreprise, je lui ai demandé s’il pouvait me garder jusqu’à l’obtention de mon visa permanent ou au pire jusqu’au dépôt de mon dossier prévue à la mi-juillet. Et il a accepté !
Préparation de mes outils de communication
Comme mon patron était déjà passé en mode « solo », il ne m’a plus vraiment donné de travail à faire. En réalité, ça faisait déjà un moment qu’il n’en cherchait plus pour moi et me laissait me débrouiller avec mes quelques clients réguliers.
J’ai donc eu beaucoup de temps libre pour :
Finir mon portfolio imprimé
Créer mon compte Behance
→ Voir mon portfolio sur Behance
Créer mon site professionnel
Ça a pris un temps fou (et ça m’a coûté de l’argent aussi) ! Je suis donc bien contente d’avoir eu une quasi « année sabbatique » tout en étant salariée pour m’occuper de ça !
- Recherche d’un template WordPress qui me convient
- Adapation du template
- Rédaction des textes, des questionnaires
- Choix et retouche des photos
- Nouvelles prises de vue dans certains cas
- Traduction en anglais et en japonais
- Correction payante d’une partie des textes pour la version anglaise
- Correction du Japonais avec mon copain pour une grande partie et traduction payante pour une page de la version japonaise
Réaliser mes cartes de visite et les faire imprimer
J’ai soigneusement cherché l’imprimeur qui me convenait et ai trouvé un atelier nommé Kokulindo faisant de l’impression Letterpress et proposant un grand choix de papiers à Kyoto.
L’impression m’a coûté assez cher, mais lorsqu’on travaille dans le graphisme, on peut difficilement se contenter de cartes imprimées au bureau et mises en page sous Word comme le salaryman de base. Je ne regrette absolument pas en tous cas ! On me complimente souvent sur l’aspect de ces cartes.
Créer des comptes dédiés à mon activité professionnelle sur les réseaux sociaux
Instagram et, avec beaucoup de réticence, Twitter.
L’obtention du visa permanent et ma démission
C’est en novembre 2018 que j’ai reçu le courrier me confirmant que ma demande de visa permanent avait été acceptée. J’ai donc pu annoncer à mon patron que je quittais l’entreprise fin décembre.
Et c’est là que j’ai commencé à nouveau à angoisser à l’idée de voler de mes propres ailes !
Je suis rentrée 3 semaines en France en janvier, pendant lesquelles j’en ai profité pour bûcher le Japonais business / Keigo. Et manger plein de saucisson aussi, faut pas déconner non plus.
Démarches administratives et installation de mon bureau
La partie administrative
J’avais consulté quelques bouquins en japonais et m’étais renseignée sur internet à l’avance, donc au final ça n’a pas été si compliqué que ça.
Il a fallu que j’aille à la mairie pour m’inscrire au régime de retraite et de sécurité sociale dont on dépend lorsqu’on n’est plus salarié (国民健康保険 kokumin kenkō hoken / 国民年金 kokumin nenkin) et que je refasse faire ma carte MyNumber.
J’ai ensuite dû remplir des papiers à remettre au centre des impôts pour me déclarer en tant qu’auto-entrepreneuse : 個人事業主 開業届 Kojin jigyōnushi Kaigyō todoke
Et finalement, je les ai remplis à l’aide d’un logiciel en ligne que j’utilise depuis pour ma comptabilité : Freee
C’est finalement pour la banque que je me suis le plus prise la tête. Je voulais ouvrir un compte séparé, permettant d’enregistrer un nom commercial (屋号 yagō) et n’assommant pas avec les frais sur les transactions avec l’étranger, pensant que mes clients seraient principalement internationaux.
Je me suis finalement débrouillée avec les 2 comptes que je possède déjà dans ma propre banque.
Le bureau
Je pensais que travailler à la maison ne serait que provisoire et me suis d’abord installée dans la pièce washitsu inoccupée de notre appartement, mais c’est finalement bien parti pour durer ! J’en parle plus en détail dans cet article de mon blog dédié au graphisme.
En ce qui concerne le matériel, j’ai eu beaucoup de chance. Mon patron m’a cédé gratuitement le Mac et la tablette graphique que j’utilisais dans l’entreprise. Et nous avons acheté une imprimante à deux avec mon copain, un jour de promo sur Amazon. Et jusqu’à il y a peu j’utilisais encore les licences Adobe de l’entreprise.
L’acquisition de clients et le démarrage de l’activité
Les clients
Là aussi, tout s’est passé en douceur.
J’ai trouvé mon premier client, un client direct, bien avant que mon activité ait officiellement démarré, grâce à Twitter, réseau sur lequel je redoutais pourtant de revenir.
J’ai aussi récupéré 2 clients réguliers de mon ancienne entreprise. Puis j’ai été contactée, sur Twitter à nouveau, par une grosse entreprise française installée à Kyoto.
Et enfin il y a 2 ou 3 mois, par une agence d’Hiroshima qui m’a découverte sur Behance, et m’a proposé un contrat mensuel à somme fixe.
Je n’ai donc pour l’instant pas manqué de travail, bien que je n’aie pas eu le temps de vraiment prospecter, mais je le ferai quand même, parce qu’on ne sait jamais ! Puis parmi mes clients réguliers, tous n’ont pas toujours autant de travail à me proposer chaque mois.
L’activité, le quotidien en tant que freelance
J’ai dû m’habituer à gérer mon planning, traiter directement avec les clients : réunions, devis, factures, appels téléphoniques, contacts sur différents réseaux (Line, Facebook Messenger, Gmail, Chatwork, Slack, Asana), en japonais la plupart du temps.
À ce propos, même si je m’étais beaucoup inquiétée pour mon niveau de japonais Keigo (poli / business), ça se passe beaucoup mieux que je ne l’imaginais. Comme je suis beaucoup plus exposée à ce type de Japonais en travaillant seule (mails et appels reçus, chats de groupe, réunions), et comme j’avais un peu révisé pendant mes vacances en France, j’ai vite pris des automatismes. Et puis mes interlocuteurs me semblent de toute façon plutôt conciliants.
La plus grande nouveauté pour moi a été de m’occuper de la comptabilité. Je n’y connaissais rien et n’en ai jamais fait en France, mais le logiciel que j’utilise (Freee), plus de nombreuses recherches sur Google, m’ont permis de bien m’y familiariser et ça devient presque un jeu désormais ! Je peux même faire ma déclaration d’impôts (確定申告 kakutei shinkoku) depuis chez moi grâce à l’achat d’un lecteur de carte, de ma carte MyNumber à puce et de mon logiciel de compta !
Le bilan
J’avais vécu l’annonce de la fermeture de mon entreprise comme le pire malheur de la terre à l’époque, mais sans cela je n’aurais peut-être jamais osé franchir le pas vers la vie de freelance. Et pourtant je suis bien plus épanouie et heureuse aujourd’hui ! Aussi bien sur le plan professionnel que personnel.
- Je travaille plus mais à mon rythme
- Je travaille principalement sur des projets qui me plaisent
- Je mène une vie plus saine et équilibrée (sommeil, repas à la maison, activité physique)
- Je passe plus de temps avec mes amis et rencontre plus de gens
- Je me sens plus libre de mes mouvements : je vais pouvoir passer 5 jours à Tokyo, ce que je n’ai pas pu faire pendant mes 8 années de salariat.
- Je gagne (pour l’instant) plus qu’en tant que salariée malgré les charges bien plus élevées (dépenses liées à l’activité, impôts sur le revenu, impôts locaux, retraite, santé)
Bref, pour l’instant le bilan est vraiment positif ! Je souhaite juste que ça dure !
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