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ぶりええじゃん!buri ee jan!*
あ、まっとったんじゃ?ah, mattotta’n ja?*
なんしょん?nan shon?*
なんなんじゃろう?nan’nan jarō?*
ばりたいぎぃけんねぇ bari taigii ken nē*
ほうなんじゃ?hō nan ja?*
ええけぇ ee kē *
ワシャお前とったるけんのー washa omae tottaru ken nō**
Vous parlez japonais, mais n’avez rien pigé aux phrases ci-dessus ? Normal c’est de l’Hiroshima-ben, tel qu’on en entend tous les jours ici. Mais pas de souci, après avoir lu cet article, vous maîtriserez ces expressions comme un vrai gars du coin ! Et ça pourrait vous servir si vous venez à Hiroshima ! Les chauffeurs de taxi, souvent des vieux messieurs, ou les pépés qui tiennent des bouis-bouis, s’expriment de cette manière !
(* phrases entendues et notées lors d’un repas avec les amis d’enfance du Gracieux / ** phrase célèbre du film « Combat sans code d’honneur »).
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Dialectes au Japon et en France
En France nous avons des accents, des expressions régionales, des patois issus de langues régionales qui subsistent avec plus ou moins de succès. Et il faut savoir que la langue française telle que nous la connaissons aujourd’hui n’a commencé à être parlée sur tout le territoire qu’entre 1882 (adoption de la loi Ferry – école gratuite et obligatoire) et la guerre de 14-18, qui a contraint les appelés, venus de différentes régions, à s’exprimer dans un langage commun. Petit à petit, cependant, le Français tend à s’uniformiser, avec l’influence de la télé et la disparition des derniers locuteurs de patois ou dialectes régionaux, la plus grande mobilité des gens.
Et bien les choses sont assez similaires au Japon. Chaque province possédait autrefois sa propre langue régionale, jusqu’à ce que le gouvernement de l’ère Meiji (1868-1912) vienne un peu mettre d’ordre dans tout ça. L’unification du langage a donc eu lieu entre le milieu de cette époque et le début de l’ère Showa (1926-1989).
Pour créer un langage commun, ou standard, on s’est alors basé sur la la langue parlée par les couches les plus aisées et éduquées de Tokyo, qu’on appelait Yamanote kotoba (山の手言葉). Et comme en France, cette unification du langage a connu des critiques et une certaine résistance.
Comme en France aussi, il reste des traces de ces anciennes langues régionales, et ainsi, on ne parle pas de la même façon selon la région où l’on habite. On appelle le Japonais écrit, celui qu’on enseigne aux étrangers où qu’on entend sur la chaîne NHK, le hyōjungo (標準語 japonais standard), mais il est aussi souvent appelé ou considéré comme le « parler de Tokyo » en province.
Mes origines linguistiques et mon amour des parlers régionaux
Je n’ai, en ce qui me concerne, pas d’accent. C’est en tous cas ce qu’on me dit quand on me rencontre pour la première fois. Mes grand-parents parlaient un patois bourguignon très prononcé (celui de Sanvignes-Les-Mines, en Saône-et-Loire). Le vocabulaire, les expressions, la prononciation (les « r » roulés) et même la conjugaison des verbes, les pronoms personnels qu’ils employaient, étaient très différents du Français standard. Je regrette, maintenant de ne pas avoir fait d’enregistrement, gardé de trace.
Le fait que mes parents aient déménagé plusieurs fois et se soient établis dans le Rhône à ma naissance, sans forcément y fréquenter beaucoup de monde, explique sûrement le fait qu’on n’ait pris aucun accent particulier. Lorsque je me suis installée seule dans le Sud (Aix-en-Provence puis Marseille), je me suis passionnée pour le parler marseillais, qui est encore bien loin d’avoir disparu.
Même chose en arrivant à Hiroshima. Je n’avais pas pris de cours de Japonais avant de m’installer ici, et mes premiers contacts avec la langue se sont faits dans cette ville. Un lien affectif s’est donc naturellement tissé entre cette manière de parler le Japonais et moi. C’est sûrement aussi pour cette raison d’ailleurs, que lorsque je regarde un film ou un drama japonais, les dialogues me semblent sonner faux.
Au contraire, quand j’entends parler le Kansai-ben à la télé (le dialecte de la région d’Osaka), ça résonne beaucoup plus en moi. Bien qu’il existe quelques petites ressemblances et expressions communes avec l’Hiroshima-ben, ça reste un dialecte très différent. Mais j’ai tout de même la sensation que cela sonne moins « rigide », plus naturel. Et puis c’est le dialecte que parle mon animateur télé et humoriste préféré : Matchan (Hitoshi Matsumoto, du duo Downtown), que j’avais d’ailleurs croisé un jour aux duty free de l’aéroport CDG ! ( je n’avais malheureusement pas osé m’approcher ni prendre de photo, alors qu’il était passé complètement inaperçu pendant au moins 20 min, et ce malgré la foule de Japonais présente… bref, je m’égare)
En tant qu’ancienne étudiante de Sciences du Langage, un domaine qui me passionne, j’avais donc envie de vous parler des dialectes au Japon, et plus particulièrement de celui d’Hiroshima.
Dialectes ou langues à part entières ?
La distinction entre langue (言語 gengo) et dialecte (方言 hōgen) n’est pas nettement définie. Ainsi, certains linguistes considèrent les parlers régionaux comme des langues à part entière, d’autres non. Toujours est-il que si les locuteurs de dialectes de régions proches se comprennent, ce n’est pas toujours le cas pour ceux de régions éloignées. Les dialectes de Kagoshima (Kyushu) et d’Aomori (Tohoku) sont réputés pour leur différence abyssale avec le Japonais standard, et sont quasiment incompréhensibles pour les gens venus d’autres régions.
Les dialectes japonais se distinguent par leur vocabulaire (語彙 goi), leur grammaire (文法 bunpō), leur syntaxe (語法 gohō), leur système vocalique (音韻 on’in), leur accentuation (アクセント akusento), leurs tournures / expressions (言い回し iimawashi) et leur prononciation (発音 hatsuon) .
Il existe de nombreuses familles et sous-familles de dialectes au Japon. Le dialecte d’Hiroshima fait partie de la sous-famille des dialectes de la région San’yo, la partie ouest de la région Chugoku (山陽方言 San’yō hōgen) qui font eux-même partie de la famille des dialectes de la région Chugoku (中国方言 Chūgoku hōgen), qui font partie de ceux de la famille des dialectes du Japon Ouest (西日本方言 Nishi-Nihon hōgen).
En résumé : Japonais > Dialectes du Japon de l’Ouest > Dialectes de la région Chugoku > Dialectes de la région Sanyo > Hiroshima-ben.
Une image associée à chaque dialecte japonais
Comme en France et pour les mêmes raisons, les dialectes japonais ont un temps connu un déclin. Comme cela nuisait à l’unité et l’identité nationales du pays, notamment en temps de guerre, les gens parlant ces dialectes étaient victimes de discrimination et souffraient de complexe d’infériorité. L’utilisation du Japonais standard s’est ensuite généralisée avec l’influence des médias.
Depuis quelques années, cependant, on cherche au contraire à les préserver. De nombreuses associations se sont crées partout au Japon, et les chaînes de télé régionales diffusent de plus en plus d’émissions en dialecte local.
Mais aujourd’hui encore, certains dialectes sont plus populaires que d’autres, certains jouissent d’une image raffinée alors que d’autres sont considérés comme vulgaires. Le Kansai-ben est par exemple très associé à la comédie, à l’humour (owarai お笑い, manzai 漫才).
L’image du dialecte d’Hiroshima
Les adjectifs qui reviennent le plus pour décrire le dialecte d’Hiroshima : 怖い (kowai : effrayant), 汚い (kitanai : rude, vulgaire, indécent), 粗雑, 荒っぽい (sozatsu, arappoi : rude, dur), 攻撃的 (kōgekiteki : agressif).
L’Hiroshima-ben est généralement considéré au Japon comme le dialecte le plus effrayant. Il est associé à l’image des yakuzas, du fait de nombreux films de ce genre (任侠映画 ninkyō eiga) ayant été tournés à Hiroshima. Le plus célèbre et le plus souvent cité est « Combat sans code d’honneur » (仁義なき戦い Jingi naki tatakai), le 1er d’une série de 6 volumes sur les yakuzas de Kure et Hiroshima, sorti en 1973. Même si vous ne l’avez pas vu, vous en connaissez forcément le thème musical principal (repris par Tarantino) et utilisé à profusion à la télé japonaise, comme jingle ou musique d’illustration pendant les émissions et reportages.
Un grand nombre de personnes avec qui j’ai discuté m’ont rapporté qu’en allant faire leurs études ou en partant travailler à Tokyo, avaient fait penser aux gens qu’ils se disputaient ou qu’ils étaient en colère, lorsqu’ils parlaient dans leur dialecte avec une autre personne d’Hiroshima. Lors d’un trajet en bus dans la capitale, le Gracieux et son grand-frère, qui se livraient alors à une joute verbale amicale, se sont aperçus que les autres passagers commençaient à les observer avec crainte et inquiétude. Et on trouve pas mal de témoignages de ce type sur le net.
Il m’est aussi fréquemment arrivé, lors de séjours en France avec des amis d’Hiroshima, de croiser d’autres Japonais qui leur demandaient avec fascination de leur parler en Hiroshima-ben. Ce n’est pas rare non plus lorsqu’on voyage hors de la préfecture au Japon.
J’ai également surpris plus d’une fois dans les izakaya, des discussions de salarymans en voyage d’affaire dans la ville, disant que les filles d’ici parlaient de manière vulgaire. Au contraire, les gens d’Hiroshima ont l’impression que les hommes de Tokyo parlent de manière féminine (ex : だからさ〜 dakara sa~).
Mais la télévision joue aussi un rôle dans le maintien de cette image. En 2009, j’étais tombée sur l’émission de Mino Monta et Machami « 秘密のケンミンSHOW » (Himitsu no kenmin SHOW) dans laquelle ils présentaient la ville d’Hiroshima sous forme de petit drama, avec tous les clichés possibles : des habitants se comportant de manière rustre et parlant un Hiroshima-ben d’une époque révolue. J’avais raconté ça en détail ici sur mon ancien blog.
Est-ce que tout le monde parle l’Hiroshima-ben à Hiroshima ?
Et bien non, ça dépend de l’âge, du sexe, du background / type d’éducation / milieu professionnel mais aussi du lieu de résidence (centre ville, banlieue, campagne), et enfin de choix et préférences personnelles. Cela dépend aussi de la situation, de l’humeur, du sujet : ainsi une personne qui s’exprime habituellement en Hiroshima-ben, ne le fera pas forcément 24h/24. Chaque locuteur a son « niveau » d’Hiroshima-ben : de « soft » à « hardcore ». Les personnes qui partent s’installer dans une autre région le perdent petit à petit et au contraire, celles qui viennent s’installer ici ont tendance, comme moi, à « l’attraper ».
Comme ailleurs, les jeunes générations ont tendance à parler une langue de plus en plus proche du Japonais standard. En particulier les filles.
Mon entourage se situant en général dans la tranche d’âge 35-50 ans, et occupant des emplois plus relaxes (secteur restauration et bar, construction, travail freelance), beaucoup parlent un Hiroshima-ben « bien gras » ! Les filles qui ont beaucoup d’amis de sexe masculin également. Mais l’autre jour, par exemple, lors d’une yakitori party chez une copine, un couple d’amis étaient venus avec leur petite fille de 2 ans qui ne parlait qu’en Hiroshima-ben ! C’était mignon !
Le dialecte d’Hiroshima : l’Hiroshima-ben
Mais venons en aux faits ! A quoi ça ressemble le dialecte d’Hiroshima ?
Je vais me servir de l’excellent manga que je suis actuellement en train de lire (et auquel je consacrerai un article plus tard) pour illustrer cette présentation de l’Hiroshima-ben (広島弁). Il s’agit de « Gen d’Hiroshima » (はだしのゲン hadashi no gen) de Keiji Nakazawa, qui relate l’histoire d’un petit garçon et de sa famille pendant la guerre, avant et après le bombardement d’Hiroshima.
Allons-y !
Les variations de verbe
La copule
Non ce n’est pas un mot sale. C’est le mot qui lie l’attribut au sujet. On va dire grossièrement l’équivalent du verbe « être » en japonais pour les non-japonisants qui auront le courage de lire jusqu’au bout !
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
équivalent « c’est » | だ (da) | じゃ (ja) |
équivalent « c’était » | だった (datta) | じゃった (jatta) |
équivalent « n’est-ce pas ? », « probablement » | だろう (darō) | じゃろう (jarō) |
plus ou moins « mais, en fait » | だけど (da kedo) | じゃけど (ja kedo) |
進次、もうすぐこの麦くえるのう、たのしみじゃ Shinji, mō sugu kono mugi kueru nō, tanoshimi ja (Shinji, on va bientôt pouvoir bouffer ce blé hein, j’ai hâte !)
はようくいたいのうあんちゃん hayō kuitai nō an-chan (Haa, j’ai vite envie d’en bouffer grand-frère !)
わしゃパンをこさえてもらうぞ washa pan wo kosaete morau zo (Et ben moi je vais me faire fabriquer du pain !)
わしゃうろんがええよ!washa uron ga ē yo! (Pour moi, ça sera des udons !)
Le verbe « être présent » pour êtres vivants / auxiliaire du présent continu
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« être présent » / « était présent » / « n’est pas présent » | いる (iru) / いた (ita) / いない (inai) | おる (oru) / おった (otta) / おらん (oran) |
« je suis en train de manger » | 食べている (tabete iru) | – |
« je suis en train de manger » forme + parlée | 食べてる (tabeteru) | 食べとる (tabetoru) / 食べとん (tabeton)* |
* ton ?! J’expliquerai cette forme de présent continu plus tard.
Le verbe dire
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« j’ai dit » | 言った (itta) | ゆった (yutta) / ゆうた (yuuta) |
« je ne dis pas » / « je n’ai pas dit » | 言わない (iwanai) / 言わなかった (iwanakatta) | ゆわん (yuwan) / ゆわんかった (yuwankatta) |
« dis ! » | 言って (itte) | ゆって (yutte) / ゆうて (yuute) |
« je suis en train de dire » | 言ってる (itteru) | ゆっとる (yuttoru) / ゆうとる (yuutoru) / ゆっとん (yutton) / ゆうとん (yuuton) / いよる (iyoru)* |
* iyoru ?! Encore une autre forme de présent continu ?! Pas de panique, j’explique après aussi !
おまえら よーくみとけ 浩二あんちゃんはこれから戦場へいくんじゃomaera yo-ku mitoke Kōji an-chan ha kore kara senjō he ikunja (Vous là ! Regardez bien ! oui, mon grand frère Koji s’en va sur le champs de bataille dès maintenant !)
もうわしら非国民だというたらしょうちせんぞ わかったか ざまあみろっ mō washira wo hikokumin da to iutara shōchi sen zo wakatta ka zamaamiro (alors arrêtez de dire qu’on est des anti-patriotes ! sinon je vous le pardonnerai pas ! vous avez compris ? Vous l’avez dans l’os !)
Le verbe faire
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« fais ! » | して (shite) | せー (sē) |
« ne pas faire » / « n’a pas fait » | しない (shinai) / しなかった (shinkatta) | せん (sen) / せんかった (senkatta) |
« pas la peine de faire » / « ne fais pas » | しなくていい (shinakute ii) / しないで (shinaide) | せんでいい (sende ii) |
元 進次 さっきは なぐったりして かんべんせえよ Gen, Shinji, sakki ha naguttari shite kanben sē yo (Gen, Shinji, pardonnez-moi de vous avoir frappé etc tout à l’heure.)
Fins de mots raccourcis, agglutinations
Les verbes à la forme négative
On coupe la fin des formes négatives en Hiroshima-ben. On coupe d’ailleurs beaucoup de choses en Hiroshima-ben.
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« je ne comprends pas » / « je n’ai pas compris » | わからない (wakaranai) / わからなかった (wakaranakatta) | わからん (wakaran) / わからんかった (wakarankatta) |
« je ne sais pas » / « je ne savais pas » | 知らない (shiranai) / 知らなかった (shiranakatta) | 知らん (shiran) / 知らんかった (shirankatta) |
« je ne sors pas » / « je ne pas sorti » | 出ない (denai) / 出なかった (denakatta) | 出ん (den) / 出んかった (denkatta) |
« je ne peux pas » / « je n’ai pas pu » | 出来ない (dekinai) / 出来なかった (dekinakatta) | 出来ん (dekin) / 出来んかった (dekinkatta) |
« il ne vient pas » / « il n’est pas venu » | 来ない (konai) / 来なかった (konakatta) | 来ん (kon) / 来んかった (konkatta) |
わしゃはらがへってもたんよ washa hara ga hette motan yo (J’ai faim, je vais pas tenir)
わしゃもじゃ washa mo ja (moi non plus)
くそっ がまんできん シラミ退治やろう kuso gaman dekin shirami taiji yarō (putain ! j’en peux plus ! exterminons ces poux !)
te + ikō devient te + ko
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« je vais aller acheter (qqch) » | 買っていこう (katte ikō) | 買ってこ (katte ko) |
te + miro devient te + mii
やってみろ (yatte miro : essaie de le faire, essaie pour voir) est tronqué et allongé : やってみぃ (yatte mii). Bon seuls les mecs disent ça et ça sonne un peu racaille quand même… やってみぃや!(yatte mii ya! ho, vas-y essaie pour voir !) si vous voulez sonner complètement local.
Les noms, les particules
♦ 何 (nani : quoi, quel ?) → なん (nan), mais なの (nano : fin de question à l’oral) devient aussi なん (nan), d’où ce genre de phrase qu’on entend vraiment tous les jours : なんなんじゃろう? (nan’nan jarō? : qu’est-ce que ça peut bien être ?)
♦ A Hiroshima, on raccourci souvent お好み焼き (okonomiyaki) en おっこん (okkon).
♦ Le の (no, particule interrogative) → ん (n) : どこに行くん?(doko ni iku’n? tu vas où ?), どうしたん?(dō shita’n? qu’est-ce qui se passe ?). Ça peut d’ailleurs porter à confusion quand on ajoute un よ (yo) à la fin : なんよ (nan’yo) parce qu’on entend quasiment ないよ (nai yo), ce qui fait penser à la négation : あいつはゲイなんよ (aitsu ha gei nan’yo : oui, il est gay !). Je vous laisse imaginer les quiproquos et malentendus quand je me suis installée à Hiroshima ! 😳
♦ この間 (kono aida : l’autre jour) → こないだ (konaida).
♦ のところ (no tokoro : chez) → んとこ (ntoko) ex: ジュディんとこ (judy’n toko : chez Judy)
♦ 面白い (omoshiroi : amusant, intéressant) → おもろい (omoroi). Si je ne dis pas de bêtise, on emploi aussi ce raccourci dans le Kansai.
ええのう 兵隊さんは米のめしがくえるけえ わしも はよう大きくなって兵隊さんになりたいよ ee nō heitai-san ha kome no meshi ga kueru kee washi mo hayō ōkiku natte heitai-san ni naritai yo (ils en ont de la chance ! Les soldats, ils peuvent bouffer du riz, moi aussi, j’ai envie grandir vite et de devenir un soldat !)
あんちゃんわしもだ an-chan washi mo da (Moi aussi grand-frère)
まい日米つぶがかぞえられるような水みたいなおかゆじゃけたまらんよ mainichi kometstubu ga kazoerareru yōna mizu mitaina okayu jake tamaran yo (On en peut plus de manger tous les jours du o-kayu avec tellement peu de riz qu’on peut compter les grains et qu’on dirait que c’est que de l’eau.)
ううう 中岡 わしゃ もうこんなとこにおるのはいやじゃ・・・ uuu Nakaoka washa mō konna toko ni oru no ha iya ja… (ouiin Nakaoka c’est bon, j’en ai marre d’être dans un lieu pareil…)
わしもじゃ washi mo ja (moi aussi)
Mots agglutinés
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« ceci… » / « cela… » | これは (kore ha) / それは (sore ha) | こりゃ(korya) / そりゃ (sorya) |
« moi.. » / « je… » ♂ | 俺は (ore ha) | おりゃ (orya) / ワシは (washi ha) → ワシャ (washa) |
そりゃ とうちゃん ふまれても強くなれといいたいんじゃろう もうききあきたよ sorya tōchan fumarete mo tsuyoku nare to iitai’n jarō mō kiki akita yo (Papa, ce que tu veux dire c’est que même si on nous marche dessus on doit devenir fort, c’est ça ? On en a marre de la crise !
Formes de conjugaison particulières
Présent continu te + (i)ru
On a deux formes en Hiroshima-ben :
- Celle qui ressemble au te + (i)ru du Japonais standard : on remplace juste le iru par oru, et on coupe la fin du te.
- Une autre où on prend la base du verbe en -masu et ajoute yoru.
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« être en train de faire » | してる (shiteru) | しとる (shitoru) |
しよる (shiyoru) | ||
« être en train de boire » | 飲んでる (nonderu) | 飲んどる (nondoru) |
飲みよる(nomiyoru) |
Et comme je vous ai déjà dit qu’on aimait raccourcir et agglutiner à Hiroshima, しよる (shiyoru) peut devenir しよん (shiyon) et même しょん ! (shon). Donc si vous voulez parler comme un badass d’Hiroshima, vous pouvez demander : なーんしょん?(naan shon? : qu’est-ce tu fous ?)
なにをボサボサしとるんじゃ 爆弾おとされるぞ はようこい!nani wo bosabosa shitoru’n ja bakudan otosareru zo hayō koi! (Qu’est-ce que vous foutez à traîner comme ça ? on va se prendre une bombe sur la tête ! Dépêchez-vous de venir !)
わ わしはなにもわるいことはしとらん なにかのまちがいだ wa washi ha nanimo warui koto shitoran nanika no machigai da (Moi, je fais rien de mal, vous faîtes erreur)
L’impératif base verbe + nasai
Là aussi, à Hiroshima, on coupe et change un peu la prononciation au passage : なさい (nasai) devient んさい (nsai) ou んちゃい (nchai). んちゃい (nchai) apporte de la douceur et sonne beaucoup moins comme un ordre que nasai, plus comme une suggestion.
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« viens ! » | 来なさい (kinasai) | 来んさい (kinsai) |
来んちゃい (kinchai) | ||
« mange ! » | 食べなさい (tabenasai) | 食べんさい (tabensai) |
食べんちゃい (tabenchai) |
さあ そのふたりをわたしんさい saa, sono futari wo watashinsai (Bon, donnez-moi ces deux-là !)
Devoir / il ne faut pas (-te ha ikenai / te ha dame / tcha dame)
しないと (shinai to : devoir faire) → せんにゃ (sennya)
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« bon, je dois y aller ! » | もう行かなくてはいけない! (mō ikanakute ha ikenai!) / もう行かなきゃいけない (mō ikanakya ikenai!) | もう行かにゃいけん!(mō ikanya iken!) |
« il ne faut pas boire ! » | 飲んではだめ!(nonde ha dame!) / 飲んじゃだめ! (nonja dame!) | 飲んじゃいけん! (nonja iken!) |
グスン どうしてわしがいけんのじゃ gusun dō shite washi ga iken no ja (snif… pourquoi tout ce que je fais c’est pas bien ?)
Ne plus y avoir (naku naru)
無くなった (naku natta : il n’y en a plus) → ないようなった (naiyō natta) / ないなった (nai natta) / のうなった (nō natta)
Changements phonétiques
♦ そう (sō : ainsi) devient ほう (hō). いい (ii : bon) devient ええ (ee).
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« oui, c’est ça! » | そうよ! (sō yo!) | ほうよ!(hō yo!) |
« ha bon ? » | そうなんだ?(sō nan da?) | ほうなんじゃ? (hō nan ja?) |
« t’inquiète » | いいから (ii kara) | ええけぇ (ee kē) |
« c’était bien » / « tant mieux » | よかった (yokatta) | えかった (ekatta) |
うるさいのう なん回きけばええんじゃ この荷物とどけて金をもらったらつくってくれるんだ urusai nō nan kai kikeba ee’n ja kono nimotsu todokete kane wo morattara tsukutte kureru’n da (Oh t’es pénible ! Tu peux demander autant de fois que tu veux, je te dis qu’une fois qu’on aura livrer les paquets, on nous donnera de l’argent et ensuite on nous en* fabriquera. * des mochi au haricot rouge)
♦ Les sons あう (au) et あく (aku) deviennent おう (ō) dans certains mots.
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« beaucoup, souvent » | よく (yoku) | よー (yō) |
« vite » | はやく (hayaku) | はよー (hayō) |
auxiliaire indiquant le résultat involontaire | しまう (shimau) → しまった (shimatta) | しもうた (shimōta) |
« recevoir » | もらう (morau) → もらった (moratta) | もろうた (morōta) |
ex : よう知っとるね〜 (yō shittoru ne! t’es bien au courant dis-donc !), はよーせーや!(hayō sē ya! : magne-toi !)
♦ Le son む (mu) devient parfois ぶ (bu) dans certains mots.
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« froid » | 寒い (samui) | さぶい (sabui) / さぶっ!(sabu!) |
♦ よ (yo) → や (ya) à l’impératif et au volitif : ex : 気にせんでや!(ki ni sende ya! te préoccupe pas !) , 飲もうや!(nomō ya! allez, allons boire un coup !)
♦ あそこ (asoko là-bas) → あっこ (akko)
♦ ね (ne) et な (na) → のぉ (nō). Mais attention, seules les très vieilles personnes utilisent encore ce fameux のぉ. Ou des personnes plus jeunes, qui veulent s’amuser à sonner yakuza. J’ai un pote de mon âge qui l’emploie fréquemment cependant. (Oui, c’est Bobby, pour ceux qui connaissent !)
♦ 汚い (kitanai : sale) → きちゃなー (kichana~) ou きしゃない (kishanai).
Des locutions typiques et particulières à l’Hiroshima-ben
♦ Oui !! le fameux jake ou jaken ! C’est la particularité la plus connue d’Hiroshima dans les autres régions du Japon, un peu le « biloute » du coin. Si vous visitez une autre préfecture et que les gens vous entendent parler en Hiroshima-ben, vous pouvez être sûr et certain qu’ils vont vous crier un « Hiroshima jaken ! » plein d’entrain !
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« parce que » après un verbe ou un adjectif en -i | から (kara) | けん (ken) / けー (kē) / けぇ (kē) |
« parce que » après un nom ou un adjectif en -na, « c’est pour ça que, du coup » | だから (dakara) | じゃけん (jaken) / じゃけー (jakē) / じゃけぇ (jakē) |
田村デキモンは栄養不足でできるんじゃ そうな Tamura, dekimon ha eiyō fusoku de dekiru’n ja sō na (Tamura, ces boutons c’est à cause de la malnutrition, et ouai…
わしら栄養のあるたべものをくうとらんけえのう washira eiyō no aru tabemono wo kuutoran kee nō (Parce que nous on mange rien de nutritif, hein.
ほんまじゃ honma ja (c’est vrai ça !)
♦ Une autre locution typique, mais moins connue et qui se perd un peu : hoide, hoijake, hoijaane, honde.
Français | Japonais standard | Hiroshima-ben |
« et puis » | それで (sore de) | ほいで (hoi de) / ほんで (honde) |
« et donc » | それだから (sore dakara) | ほいじゃけー (hoi jake) |
« et donc » | それでは (sore de ha) | ほいじゃあ (hoi jaa) |
« à plus » | じゃあね (jaa ne) | ほいじゃあね (hoi jaane) ♀ / ほいじゃったら (hoi jattara) ♂ |
♦ « Je « / « moi » se disent わし (washi) pour les hommes et うち (uchi), pour les femmes. S’emploie plutôt chez les personnes âgées (homme de minimum 40 ans et plus) ou chez les filles de la campagne pour うち.
Le vocabulaire du dialecte d’Hiroshima
Vous pouvez trouver des listes beaucoup plus complètes, mais 90% des mots sont complètement obsolètes, j’ai donc fait un tri avec des personnes de mon âge pour ne garder que ceux qui s’utilisent encore. La liste réduit encore drastiquement si on demande à des gens de 20 ans.
avant-hier : 一昨日 peut se lire おととい (ototoi) ou おとつい (ototsui). Comme dans la plupart des autres régions de l’ouest, on préfère la 2ème lecture à Hiroshima.
Français | Hiroshima-ben | Français | Hiroshima-ben |
très | ぶり* (buri) / ぶち (buchi) / ばり* (bari) / ばち (bachi) / がち (gachi) | faire la gueule | はぶてる* (habuteru) |
beaucoup | えっと (etto) / よーけ (yōke) | vraiment | げに (geni) / ほんまに* (honma ni) / よいよ (yoiyo) |
atteindre / ne pas atteindre | たう (tau) / たわん (tawan) | combien ? | なんぼ? (nanbo?) |
être cassé, être parti en couille / casser | めげる (megeru) / めぐ (megu) | mou / gentil | やおい (yaoi) |
d’abord, pour commencer | たちまち (tachimachi) | une bière pour commencer | たち生で!(tachinama de!) |
ça sert à rien d’en parler / c’est hors de question | ことにならん (koto ni naran) | un peu | ちびっと (chibitto) / ちょびっと* (chobitto) / ちーと (chīto) |
qqun qui fait croire qu’il savait | しったげ* (shittage) | tiède, chaud | ぬくい* (nukui) |
un bleu | あおじ (aoji) | pénible, dur | たいぎぃ* (taigii) |
facile | みやすい (miyasui) | le bordel, n’importe quoi | わや* (waya) |
canette vide | かんかん* (kankan) | ça prend la tête | はがええ* (hagaee) |
vas-y rentre ! (chez moi, dans la maison) | あがりんさいや!(agarinsai ya!) | rentrer (chez soi) | いぬる (inuru) |
difficile | いたしい (itashii) / やねこい (yanekoi) | mélangé | いっしょくたー (isshokuta~) |
bizarre | いなげな (inagena) | pas du tout, pas le moindre | いっそ (isso) |
bien, bonne impréssion | えーあんばい (ēanbai) | rusé, sournois, malin, fourbe | えげつない (egetsunai) / こすい (kosui) |
se plaindre | かばち(を言う) (kabachi (wo iu)) | radin, mesquin, cheap | がめつい (gametsui) |
petit | こまい (komai) | pardonner | こらえる (koraeru) |
c’est pas marrant, c’est nul | さえん (saen) / つまらん (tsumaran) | être écrasé, démoli, se démolir | へしゃげる (heshageru) |
crier, gueuler | おらぶ (orabu) | s’imprégner / se moucher | しゅむ (shumu) / 鼻をしゅむ (hana wo shumu) |
crevant, dur, chiant | しわい (shiwai) | épine, pointe, arrête | すいばり (suibari) |
s’élimer, se ratatiner (ex : talon de chaussure) | ちびる (chibiru) | faire bouger qqch | どかす (dokasu) |
hésitation, retenue | 気兼ね (kigane) | le plus nul | どべ (dobe) / どんけつ (donketsu) |
engueuler | どやす (doyasu) | dire | ぬかす (nukasu) |
lécher, sucer (oui aussi au sens sexuel) | ねぶる (neburu) | c’est bon, ça va (= j’en veux plus, peux plus) | はあえー (haa ē) |
insérer, coincer | はせる (haseru) | rejeter (qqun) | はねにす (hane ni suru) |
traîner, tirer | ひこずる (hikozuru) | avoir l’air nul / avoir l’air cool | ふーが悪い (fū ga warui) / ふー がええ (fū ga ee) |
c’est dégueulasse, ça craint, désagréable | 気色わるい (kishoku warui) | frapper, donner un coup de pied | けつる (ketsuru) |
acide | すいい (suii) | l’équivalent d’un Pierre Richard ou qqun qui foire tout | どんくさい (donkusai) |
frapper, donne une correction à qqun | ぴしゃげる (pishageru) | gras | むつこい (mutsukoi) |
orgelet | めぼ* (mebo) | s’enlever, disparaître | もげる (mogeru) |
laissez-moi en être, faites-moi entrer dans votre bande | よせて (yosete) | paie-moi un coup ! invite-moi ! | よばれる (yobareru) よばれんちゃいや!(yobarenchai ya!) |
un sale coup | わるさ (warusa) | personne bizarre | へんくー (henkū) |
Fais-moi un rabais ! | まけんさい (makensai) / まけてや!(makete ya!) | l’apparence, le look | みてくれ (mitekure) |
peler (la peau d’une orange, etc) | むぐ (mugu) | copier, reproduire | もじる (mojiru) |
arrête de soûler, d’être pénible, de faire des histoires | やんやん言うな (yanyan iu na) | je peux pas | よーせん (yōsen) |
pantoufles | うわばき (uwabaki) / うわぶつ (uwabutsu) | à peu près | おおかた (ookata) |
se moquer, ridiculiser | おちょくる (ochokuru) | être en panne | がたが来る (gata ga kuru) |
voler (dérober) | がめる (gameru) |
勉強もしないで毎日 畑づくりばっかりじゃ つまらんのう benkyō mo shinaide mainichi hatake zukuri bakkari ja tsumaran nō (On étudie même pas, on est tous les jours dans les champs, on fait que ça toute la journée, c’est pas marrant hein ?)
田村 このイモはもう大きくなっとるかのう とりだしてたべてみようか!Tamura kono imo mō ookiku nattoru ka nō, toridashite tebete miyō ka! (Tamura, ces patates douces m’ont l’air mûres, si on les arrachait et qu’on les mangeait pour voir ?)
Quelques liens vidéos pour écouter parler en Hiroshima-ben
Mitsuo Tatsukawa : ancien joueur des Carp (l’équipe de baseball d’Hiroshima), coach et commentateur sportif à la télé. Les gens d’Hiroshima l’aiment bien parce qu’il garde son accent même sur les chaînes nationales. Vidéo ici (c’est le monsieur du milieu avec les lunettes).
Une petite fille à qui on fait un quizz de vocabulaire Hiroshima-ben. Vidéo ici.
Un extrait du film Gen d’Hiroshima. Vidéo ici.
Une parodie d’Hiroshima-ben : des mecs qui s’amusent à doubler les pub Apple américaines en Hiroshima-ben. Attention par contre ça sonne complètement faux ! Comme quand des Parisiens essaient d’imiter le Marseillais en accumulant toutes les expressions à la suite. Mais c’est drôle ! Vidéo ici.
Et moi dans tout ça ? comment je parle ?
Comme je vous l’ai dit au début, mon premier contact avec la langue japonaise s’est fait à Hiroshima. J’ai donc dès le départ « absorbé » sans le savoir, des tas d’expressions et tournures locales.
J’ai ensuite eu une « période de rejet », pendant laquelle j’essayais de me défaire de ces habitudes pour apprendre le Japonais standard. Et j’ai toujours du mal, quand je dois parler « sérieusement », poliment dans le cadre du travail par exemple. J’ai tendance à me sur-corriger, je suis mal à l’aise et ai du mal à m’exprimer, parce que ça m’oblige à un effort mental pour transposer ce que je veux dire en Japonais standard.
En gros, j’utilise au quotidien et avec les amis la quasi-totalité de ce que nous avons vu dans la partie grammaire, en dehors des formes en « hoi », et de « uchi » pour « je ». Je ne remplace pas non plus les « sō » par « hō ».
Concernant le vocabulaire, je n’emploie que quelques mots de cette liste (signalés avec une *). J’ignorais d’ailleurs jusqu’à peu, pour certains de ces mots, qu’il s’agissait d’Hiroshima-ben et ne connaissais / connais pas l’équivalent en Japonais standard.
Je trouve que parler un dialecte est une expérience enrichissante. C’est un facteur favorisant énormément l’intégration / l’acceptation par les gens du lieu où l’on vit. Cela nous donne une chose en commun, une chose que l’on partage (et pas des moindres : le langage), cela nous fait entrer dans un groupe. Et au contraire, nous distingue de personnes qui auraient dû faire partie d’un cercle plus proche : les Japonais d’autres régions.
En conclusion, je vous encourage vraiment à apprendre le dialecte de votre région si vous vivez au Japon !
Pour faire ces recherches, je me suis basée sur mes connaissances, sur ce que les gens d’ici m’ont expliqué mais aussi sur des sites. Bien qu’ayant fait les recherches en japonais uniquement, la plupart des sites trouvés donnaient des informations complètement fausses. Comme quoi ce n’est pas un gage de qualité. On m’a dit qu’ils n’étaient visiblement pas écrits par des habitants d’Hiroshima.
Xavier
septembre 24, 2016
Excellent article encore une fois! Sorti des sentiers battus et un peu hardcore pour un non-japonisant, mais intriguant et passionnant… comme le Hiroshima-ben finalement!!
Par contre j’ai été intrigué par la partie de l’article qui traite de la communication au travail avec les clients. La difficulté à revenir à un langage plus classique et, surtout, la gêne que cela engendre me surprend. Les japonais n’ont-ils pas une plus grande tolérance à l’utilisation d’un registre de langue moins raffiné de la bouche d’une étrangère? Ce serait vraiment sympa de faire un article sur le sujet des interactions professionnelles entre des clients japonais et une pro étrangère!
Judith Cotelle
septembre 25, 2016
Merci !
Oui, tu as tout à fait raison, c’est moi qui me prends beaucoup trop la tête et tout le monde me le dit. D’autant plus qu’il est tout à fait possible de parler l’Hiroshima-ben en keigo (langage poli). C’est sûrement un manque de confiance de ma part.
D’ailleurs je comprends très bien le keigo, mais le pratiquant peu, j’ai du mal à le parler, du coup je ne suis pas sûre de moi et panique un peu et … en perds mon Japonais ! 😀
Je suis aussi très nulle en télé, interview mais l’autre jour, une journaliste du Chugoku Shinbun (journal papier) est venue m’interviewer et comme elle-même parlait de manière plutôt familière, ça m’a mise à l’aise, et j’ai réussi à m’exprimer beaucoup mieux que d’habitude. L’article n’est pas encore paru mais pour une fois je suis assez satisfaite de moi ! J’ai pu dire tout ce que j’avais envie de dire comme il n’y avait pas le blocage du langage.
Le même jour, j’ai eu une réunion à la mairie d’Hiroshima pour le brief d’une affiche qu’ils nous ont commandé et comme nos 2 interlocuteurs étaient jeunes, dynamiques et rigolos, je me suis détendue et ai parlé plus ou mois comme je parle habituellement.
Ta suggestion de sujet pour un article est intéressante, j’y réfléchirai !
Xavier
septembre 26, 2016
J’espère que tu nous traduiras l’article que te consacre le Chugoku Shinbun.
Tu as l’air épanouie dans ton travail et cela tranche agréablement avec les articles pessimistes sur l’intégration pro des français qui fleurissent sur le net. C’est pour cela que je suis intéressé par ton retour d’expérience et, au-delà, par ton avis sur ce sujet
Eva
septembre 25, 2016
Article vraiment intéressant, j’aime beaucoup ! Bravo pour toutes tes recherches, c’est du beau boulot !
J’ai une amie japonaise originiaire d’Hiroshima, a part le じゃ en fin de phrase je ne connaissais pas d’autres expressions. En lisant ton article, je comprends mieux pourquoi tu dis etre plus familiere au kansai-ben, il y a pas mal de mots similaires ! Comme je te l’avais dit je ne sais plus si dans l’anime de Hagashi no gen ils parlent en Hiroshima-ben, mais si c’est le cas je n’ai pas du trop le remarquer du fait de ses similitudes avec le Kansai-ben.
Ma belle-famille parle le kansai-ben, je le comprends, je peux le parler, mais mon mari me dit que ce n’est pas joli et que c’est mieux de parler le japonais standard, mais bon apparamment ma belle-famille dit que parfois je le parle sans m’en rendre compte. Effectivement le kansai-ben peut paraitre agressif, rude, mais je dirais plutot que c’est une langue bien « vivante », plus spontanee. C’est drole quand meme, je parle mieux le dialecte du Kansai, plutot que celui de ma propre region, l’alsacien *shame on me* ><
Judith Cotelle
septembre 27, 2016
Merci pour ton commentaire !
Oui, si ton amie est jeune (moins de 35 ans) et si ça fait un moment qu’elle est installée dans la région, c’est possible qu’elle ne ne parle plus ou ne l’ait jamais parlé de manière trop exagérée.
Sinon, oui comme moi, pas de dialect / accent régional chez moi en France, mais ici si. C’est le fait d’y avoir été beaucoup plus exposée juste au moment où j’apprenais la langue certainement.
Béné
septembre 26, 2016
C’était très intéressant à lire. merci.
J’ai trouvé quelques ressemblances avec le dialect local et ça explique peut-être pourquoi mon chef d’équipe originaire d’Hiroshima parle aussi bien l’Hakata-ben (il n’utilise pas du tout celui d’Hiroshima au travail).
J’en parlerais dans mon propre article mais en dehors du travail je ne suis pas entourée de personnes parlant le dialect. Mon copain ne le parle pas du tout sauf quelques mots alors j’ai un peu de mal à le parler moi aussi (au travail vu que ce sont tous mes senpai je ne peux pas me le permettre car ce n’est pas correct même si eux me disent d’essayer).
Judith Cotelle
septembre 27, 2016
Merci !
Tu penses que le fait que les gens autour de toi parlent plutôt en Japonais standard vient du fait que vous êtes un peu plus jeunes ? Ici, comme je le disais dans mon article, les gens de moins de 35 ans ne parlent quasiment plus Hiroshima-ben.
m0shi
septembre 27, 2016
Article très intéressant, ultra complet : quel boulot ! 😮
C’est marrant, mis à part ton tableau de vocabulaire à la fin, vraiment local, ma femme (et sa famille) utilisent régulièrement les même expressions, genre : じゃ/ おる / おった / おらん / わからん / わからんかった / 知らん / 知らんかった / 出ん (den) / 出んかった / 出来ん (dekin) / 出来んかった / ……………
Du coup, je me demande si quand même, il n’y a pas des expression comme ça, un peu globales au Japon, du langage familier quoi, qui finalement, ne serait pas si attaché à une région que ça ?
Judith Cotelle
septembre 30, 2016
Merci beaucoup !
Oui, la copule « ja » et la fin des verbes coupées ne s’utilisent pas uniquement à Hiroshima, tu peux voir la carte qui couvre ce genre d’utilisation sur la page Wikipédia des dialects. D’où viens ta femme ? plutôt du Sud-Ouest j’imagine ?
m0shi
septembre 30, 2016
De la terre du milieu, Komatsu (Ishikawa).
Merci pour tes précisions sur Twitter 😉
Selon la page wiki, on est en plein dedans alors, mais par contre je les ai jamais entendu utiliser じゃ+や. Plutôt じゃ+な, mais là on est plus dans une « fin de phrase » courante je pense.
C’est intéressant de voir ces similitudes et différence selon les régions. À Voir si avec le temps elle perdureront ou disparaîtront ? 😮
Judith Cotelle
septembre 30, 2016
Le + veut dire que dans la même région les 2 s’utilisent 🙂
christian
septembre 29, 2016
Très intéressant. Ma compagne qui a vécu son enfance à Kôchi dans Shikoku (où on parle le Tosaben, comme Sakamoto Ryo) me disait également une chose similaire : à son arrivée, sa mère, originaire de la région de Tokyo, croyait que tout le monde s’engueulait tout le temps là-bas.
Les gens de kôchi ont la réputation d’avoir du caractère aussi, semble-t-il
Il y a des différences comme : « yaki » pour remplacer le prédicat : okonomiyaki suki yaki.
L’obligation : tu dois boire ! nomanto ikanga yaki !
La forme en teiru : chû (je me dis qu’il y a une relation avec « le kanji » naka/chû?) : tabechûki…. Etc
Judith Cotelle
septembre 30, 2016
Merci pour ton commentaire !
Intéressant ! je n’ai jamais entendu parler les dialects de SHikoku, ça a l’air très différent de ceux de la région d’Hiroshima.
christian
septembre 30, 2016
En anecdote, l’ancien Ghibli (1993), « umi ga kikoeru », est censé se passer à Kôchi. On y entend des tournures de tosaben mais, c’est assez léger pour que tout le japon comprenne (et ma compagne me disait que c’était plus de l’imitation… Je n’ai pas assez d’oreille pour cela).
Je ne connais pas d’autres oeuvres audiovisuelles où l’on pourrait l’entendre. Sauf à y aller, bien sûr…..
Ils ont aussi la réputation d’être de grands buveurs : une japonaise avec qui j’ai travaillé une fois me disait avoir eu un voyage d’affaire là-bas et en descendant de son véhicule, elle tombe sur une pancarte indiquant « Yowai saké dasemasen zo ! » (haha)
Judith Cotelle
septembre 30, 2016
Ah ! En revanche je crois avoir déjà entendu parler de cette réputation de gros buveurs !! 🙂
polo
décembre 27, 2016
C’est cool de prendre comme référence le manga Gen d’Hiroshima qui est tout simplement la + grande oeuvre graphique de tout les temps,a mes yeux.Je conserve précieusement mes 10 volumes(intégral) des éditions Vertige Graphic,hors du Japon il n’y a qu’en France ou la totalité des volumes sont sortis,respect éternel au grand Keiji Nakazawa et a tous ceux qui l’ont aidés pour publier cette oeuvre unique.
Judith Cotelle
décembre 27, 2016
Comme je les lis en japonais ça me prend du temps, et j’ai dû faire une pause pendant un moment, mais je compte bien m’y remettre pendant les vacances. En effet, c’est excellent !